Peramide

 

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Pour sortir de la crise d’employabilité que traverse actuellement le secteur productif au Québec, il faut trouver des solutions rapides et efficaces. Tout semble indiquer que la solution, à court terme, est d’accueillir un nombre significatif des travailleurs étrangers et de les rediriger vers les secteurs industriels touchés par la pénurie d’une main-d’œuvre non-qualifiée. Or, bien que les solutions à la portée des décideurs soient cadrées en fonction des besoins criants de l’industrie, il est impératif de rappeler que ces travailleurs étrangers jouissent de mêmes droits que tous les travailleurs au Québec et qu’il faut veiller sur leur santé, leur sécurité et leur bienêtre au travail.

La CNESST est sensible à cette problématique et offre actuellement des séances d’information en espagnol aux travailleurs saisonniers du milieu​ agricole, mais il faudrait penser à offrir un accompagnement plus soutenu, en particulier lorsque les éléments socioculturels peuvent affecter la perception que ces travailleurs peuvent avoir des risques et des accidents en milieu de travail.

La publication des documents officiels en ligne est une bonne initiative, mais il se peut que la réelle compréhension de cette information soit un défi de taille pour des travailleurs étrangers sous-scolarisés et, possiblement, analphabètes. Les entreprises québécoises peuvent et doivent assumer plus des responsabilités à l’égard de ces travailleurs en situation de vulnérabilité et diriger davantage des ressources vers un soutien plus ciblé de leurs travailleurs étrangers. Pour avancer dans cette direction, un changement d’imaginaire s’impose au sein de l’entreprise. En effet, les entreprises québécoises devront prendre très au sérieux l’idée selon laquelle l’investissement dans le développement des compétences des travailleurs, à la fois professionnelles (savoir-faire) et personnelles (savoir-être), s’avère rentable sur le court et le long terme. Prenons comme exemple le cas de l’apprentissage de la langue française en tant que langue seconde dans une entreprise à tendance multiculturelle. Les employeurs québécois s’attendent à ce que cette main-d’œuvre soit pour le moins francisée. Or, si l’on adhère à la thèse du déclin du français au Québec, il faut se rendre à l’évidence que la francisation des nouveaux arrivants en dehors du contexte de travail ne semble pas très effective, bien que l’investissement soit massif de la part du gouvernement du Québec. Généralement, les nouveaux arrivants doivent choisir entre la francisation ou l’échange de leur force de travail pour un revenu plus significatif dans une entreprise dont l’activité productive ne requiert pas des compétences linguistiques avancées. C’est ainsi que le problème d’intégration s’envenime progressivement.

Les entreprises québécoises peuvent contribuer à briser ce cercle vicieux en francisant leurs travailleurs étrangers durant les heures de travail. Elles pourraient ainsi favoriser leur intégration à la vie professionnelle et sociale et, par ricochet, assurer leur santé, leur sécurité et leur bienêtre. En effet, l’apprentissage de la langue française en milieu de travail peut être jumelé à la compréhension et l’intégration des normes, des règles et des codes de santé et de sécurité.

 D’autres thématiques peuvent aussi s’avérer très pertinentes dans le cadre d’une entreprise multiculturelle, comme les relations entre les hommes et les femmes dans le contexte professionnel, la gestion des conflits en milieu de travail et la communication interculturelle, les valeurs de la société d’accueil, etc.

Conclusion

Le début de la vie professionnelle ne devrait pas se traduire par la fin du processus de francisation et d’intégration à la société d’accueil. Malheureusement, c’est ce qui arrive le plus souvent. Certes, le gouvernement du Québec offre des services de francisation aux entreprises québécoises, mais nous considérons que l’État doit céder un peu plus de place au milieu des affaires dans la poursuite des objectifs communs. Ce serait bien à la fois pour l’État et pour les entreprises québécoises. Mais, pour responsabiliser davantage le milieu des affaires, le gouvernement doit savoir déléguer, soutenir et encourager les initiatives privées qui vont dans la direction souhaitée. Autrement dit, les entreprises québécoises investissant dans le développement des compétences professionnelles et personnelles de leurs travailleurs étrangers devraient recevoir l’appui inconditionnel du gouvernement du Québec et des initiatives provenant du milieu des affaires.